La guerre d’agression russe contre l’Ukraine constitue une violation flagrante des règles élémentaires du droit international. La Cour internationale de justice de La Haye l’a souligné très clairement (https://www.icj-cij.org/public/files/case-related/182/182-20220316-ORD-01-00-FR.pdf). Les justifications changeant à plusieurs reprises de la part des dirigeants russes pour cette prétendue « opération spéciale » prouvent à elles seules l’absence totale de justification.

L’attaque russe est une violation manifeste de la loi !

L’attaque est également clairement contraire au droit russe. L’article 15 IV de la Constitution russe ne déclare pas seulement que les « principes et normes généralement reconnus du droit international » font partie intégrante du système juridique russe. Il est également stipulé dans l’article 79.1, ajouté en 2020, que la Russie doit « soutenir et renforcer la paix internationale et … ne pas s’ingérer dans les affaires intérieures d’un Etat« . En outre, le code pénal russe prévoit, à l’article 353, une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 20 ans pour la préparation et la conduite d’une guerre d’agression. Même en vertu de son propre droit, Poutine devrait se trouver dans une cellule de prison !

Il a donc rarement été aussi facile d’identifier l’agresseur dans un conflit. L’Europe n’avait pas connu une telle rupture de civilisation depuis des décennies. A l’intérieur du pays également, le régime russe a laissé tomber ses derniers scrupules : Les derniers médias libres ont dû cesser leur activité, Memorial a été interdit, des milliers de Russes ont été arrêtés uniquement parce qu’ils manifestaient contre la guerre. La Russie retombe dans des chapitres sombres de son histoire.

La Russie de Poutine ne peut plus être un partenaire.

Le nihilisme juridique cynique du régime russe est devenu manifeste. Personne ne peut plus fermer les yeux sur le fait que la Russie de Poutine s’est catapultée hors de la maison Europe et du cercle des Etats de droit civilisés. La fin de l’adhésion au Conseil de l’Europe était logique. Un tel régime ne peut plus être un partenaire !

Peut-il, doit-il encore être un partenaire commercial ? La politique et l’économie en Europe semblent le supposer dans une large mesure. Comment comprendre autrement les hésitations et les tergiversations actuelles de nombreux hommes politiques et entreprises.

Il est pourtant évident que ce sont les échanges économiques avec l’Europe qui ont permis à la Russie de s’armer et de se lancer dans la guerre. C’est avec effroi que l’on lit des rapports sur la technologie française, allemande et italienne intégrée dans les véhicules militaires russes. Nos paiements pour le gaz et le pétrole constituent la base du système économique russe. L’amère vérité est que ces revenus permettent à Poutine de maintenir son appareil militaire et son système de répression. Alors que nous rêvions d’un rapprochement, les préparatifs de guerre étaient déjà en cours dans le pays.

La politique occidentale, et surtout allemande, de ces dernières décennies, qui a misé sur le « changement par le commerce » (« Wandel durch Handel« ), s’est soldée par un échec cuisant. En conséquence, la Russie est aujourd’hui plus éloignée de la paix, de l’État de droit et de la démocratie qu’elle ne l’était en 1991. Qui plus est, nous nous sommes rendus tellement dépendants de la Russie en matière de politique énergétique que nous nous trouvons aujourd’hui face à un dilemme. Ce sont les hommes et les femmes d’Ukraine qui paient le prix sanglant de cette politique erronée.

Les entreprises doivent également reconnaître que la fixation sur les avantages du commerce et des investissements a empêché une vision claire des réalités du régime. Comment les entrepreneurs peuvent-ils parler de responsabilité sociale des entreprises ou de droits de l’homme dans les chaînes d’approvisionnement tout en continuant à faire des affaires avec la Russie ? A plus forte raison, il n’existe aucune justification morale pour continuer à engranger des bénéfices dans le commerce avec la Russie.

La triste vérité est que l’Occident finance la guerre d’extermination russe avec des centaines de millions d’euros par jour (!). Sans ces revenus, le régime russe ne serait très rapidement plus en mesure de payer sa guerre.

Fermer les tuyaux de gaz pour faire taire les canons !

Il convient donc de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre fin immédiatement à l’importation de matières premières en provenance de la Russie. Les projets auxquels nous sommes attachés, comme l’abandon de l’énergie nucléaire ou du charbon, doivent être mis en attente (pour l’instant), et nous devons, si nécessaire, accepter des pertes personnelles. Tous les efforts doivent être subordonnés à l’objectif de faire taire immédiatement les armes et d’amener les troupes russes à se retirer d’Ukraine sans délai.

La liberté et la paix ont un prix ! Les citoyens européens le comprennent, probablement mieux que de nombreux hommes politiques. Ils sont prêts à faire des sacrifices pour mettre un terme à la guerre en Ukraine. Les décideurs politiques doivent enfin prendre les mesures qui s’imposent et mettre fin à tout financement de l’agresseur !

Le professeur Rainer Wedde enseigne le droit économique à la Wiesbaden Business School de l’université RheinMain. Il a passé sa thèse de doctorat sur un sujet de droit de l’Europe de l’Est et a travaillé comme avocat pour plusieurs cabinets internationaux, notamment à Moscou. Il est membre du comité directeur de l’association germano-ukrainienne des juristes et co-porte-parole du groupe spécialisé en droit de la DGO. Contact: rainer.wedde@STOPfinancingtheaggressor.org

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